Les véhicules électriques et la disponibilité des ressources

Voilà une autre grande interrogation quant à l’impact écologique des véhicules électriques. Certes, les VE, sur leur cycle de vie, consomment bien moins d’énergies fossiles que leurs homologues traditionnels. Mais qu’en est-il de la disponibilité des ressources, minerais exotiques et rares utilisés dans la fabrication des batteries et des moteurs électriques ? Ne ferait-on pas finalement que déplacer, ou retarder, le problème de l’épuisement des ressources ?

Pour commencer à répondre, prenons le cas du lithium. On l’a vu dans l’article consacré aux batteries, c’est le composant principal de la très grande majorité des batteries modernes, et, l’usage de ces dernières grandissant, les fabricants de batterie en deviennent les premiers consommateurs (ses autres applications, toujours majoritaires à l’heure actuelle, étant notamment le verre et les céramiques, les graisses lubrifiantes ou encore l’industrie de l’aluminium.).

Si le lithium est un matériau relativement abondant sur terre, son exploitation en grand volume est difficile. Une grande partie des réserves est en effet constituée par les océans, dans lesquels le lithium est très fortement dilué (près de 600 fois plus que le sodium). Le lithium exploité actuellement est principalement produit à partir de sources terrestres : les grands déserts de sel et des mines. 70 % des réserves connues sont en Amérique du Sud, dans les salars d’Argentine, de Bolivie, du Chili et du Brésil, 15% en Chine et presque autant en Amérique du Nord.

L’exploitation du lithium est encore relativement faible, et de nombreux projets démarrent pour la développer. Néanmoins, il est intéressant d’estimer ce que représentera la consommation de lithium pour les voitures électriques, lorsque celles-ci se seront généralisées.

La masse de lithium utilisée pour fabriquer une batterie est très variable. Elle dépend bien entendu de sa capacité et de sa technologie, mais aussi du rendement des processus de fabrication. En prenant comme valeur moyenne 2 kg de carbonate de lithium par kWh, et une capacité moyenne des batteries de 40 kWh, on peut donner une approximation du besoin en carbonate de lithium à 80 kg par véhicule. Cela donnerait donc un besoin en carbonate de lithium de 7,2 millions de tonnes pour équiper la totalité des voitures vendues en 2020 (90 millions, hypothèse médiane), ou, pour prendre une hypothèse plus réaliste, 1,8 millions tonnes pour équiper le quart des véhicules.

Estimer l’autre côté de l’équation, c’est à dire la quantité de lithium disponible, n’est pas plus facile. Il faut additionner la production de lithium de sources connues et exploitables au prix actuel, les réserves identifiées mais non encore exploitées et enfin les réserves déduites, c’est à dire un potentiel identifié mais pas encore exploré. En 2011 (US geological survey), les réserves identifiées s’élevaient à 33 millions de tonnes de carbonate de lithium, dont 80% (26 millions de tonnes) présentaient la pureté nécessaire pour la fabrication de batteries. On voit donc que la demande pour équiper 25% de la production automobile en 2020, calculée au paragraphe précédent, ne correspond donc qu’à 6% des réserves identifiées.

Mais il ne faut pas oublier une autre dimension à la question des ressources : à la différence des hydrocarbures brûlés dans les moteurs à combustion interne, le lithium n’est pas détruit. Il peut être recyclé. Ce recyclage n’est pas encore une réalité, car le coût actuel du lithium ne le rend pas rentable (à la différence d’autres composants des batteries, le cobalt ou le nickel par exemple). Les procédés de recyclage sont néanmoins en développement très rapide, et il parait tout à fait vraisemblable que celui-ci sera généralisé dès que l’équilibre économique sera favorable.

En conclusion, la situation des ressources nécessaires à la fabrication des voitures électriques est bien moins noire que certains détracteurs voudraient la décrire. Les ressources minérales existent en quantité importante, et surtout, les technologies de recyclage qui se développent permettra de limiter fortement les besoins nouveaux. Il n’en reste pas moins que ces matériaux deviennent de nouveaux matériaux stratégiques, dont la disponibilité va devenir un enjeu géopolitique majeur.

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